Présentation du CSM

Présentation du CSM

PRESENTATION DU CONSEIL SUPERIEUR DE LA MAGISTRATURE

Le Conseil supérieure de la magistrature est un organe constitutionnel destiné à garantir l’indépendance du pouvoir judiciaire, par la gestion de la carrière et de la discipline des magistrats.

Historiquement, le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), à l’instar de la plupart de nos institutions républicaines, a connu une évolution en dents de scie.

En effet, il vous souviendra que notre pays, a accédé à l’indépendance en 1958 dans des conditions difficiles. Ainsi face aux multiples défis, notre pays avait choisi de se doter d’une Constitution rigide qui instaurait un système de Parti unique et un Exécutif fort pour diriger la Révolution. Dans ce contexte, le juge ne bénéficiait pas d’un statut particulier par rapport aux autres fonctionnaires de l’Etat.

En 1984, suite à un bouleversement politique causé par la mort subite du Chef de l’Etat, Ahmed Sékou Touré, survint un nouveau système politique qui se voulait libéral. Cette mutation avait abouti en 1991 à la promulgation d’une Loi fondamentale qui prévoyait la cohabitation des institutions républicaines selon le principe de la séparation des pouvoirs.

Cette Loi avait engendré les lois organiques L/91/011 du 23 décembre 1991 portant Statut de la magistrature et L/91/010 de la même date portant création du Conseil supérieur de la magistrature.

Malheureusement, ces deux lois qui reprenaient le schéma classique propre aux pays francophones, n’ont jamais été appliquées. Il a fallu attendre la promulgation des lois organiques du 17 mai 2013 portant respectivement Statut de la magistrature et celui du Conseil supérieur de la magistrature, pour voir l’installation officielle dudit Conseil le 09 juillet 2014.

Depuis cette date, le Conseil supérieur de la magistrature joue pleinement son rôle. A la prise du pouvoir par le Comité national du Rassemblement pour le développement (CNRD), il a été maintenu par l’Ordonnance N°2021/005/PRG/CNRD du 29 septembre 2021 portant prorogation du fonctionnement du CSM, afin d’accomplir l’ensemble de ses missions régaliennes.

Pour avoir une vue d’ensemble sur ce Conseil supérieur de la magistrature, il importe d’examiner successivement sa composition (A), ses attributions (B), son organisation et son fonctionnement (C).

A Composition :

Aux termes de l’article I de la loi organique L/055/CNT/2013 du 17 octobre 2013, le CSM comprend 17 membres dont 4 membres de droit et 13 membres élus ou désignés par leurs pairs.

Les membres de droit sont :

    - Le Président de la République, Président du CSM ;

    - Le Garde des Sceaux, ministre de la justice qui en est le Vice-président ;

    - Le Premier Président de la Cour suprême ;

    - Le Procureur général près ladite Cour.

L’article 5 de la loi organique susvisée dispose que « les membres de droit sont désignés eu-égard au poste qu’ils occupent ; leur qualité fixe la durée de leur mandat et ils sont remplacés de plein droit dès la nomination de leurs successeurs ».

Les autres membres du CSM sont :

    - Deux magistrats de la Cour suprême élus en Assemblée générale de ladite Cour ;

    - Un premier président de Cour d’appel désigné par ses pairs ;

    - Un Procureur général près une Cour d’appel, désigné par ses pairs ;

    - Un magistrat de l’Administration centrale du ministère de la justice, désigné par ses pairs ;

    - Six magistrats élus en Assemblée générale des Cours d’appel ;

    - Un Président de Tribunal de 1ère instance, désigné par ses pairs ;

    - Un Procureur de la République désigné par ses pairs.

B- Attributions:

L’attribution la plus importante du CSM est d’assister le Chef de l’Etat dans sa mission de garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire et dans ses rapports avec l’institution judiciaire. A ce titre, l’article premier du Décret D/2013/152/PRG/SGG en date du 1er octobre 2013 fixant les règles de fonctionnement du CSM prévoit que ce conseil est notamment chargé de :

    - Contribuer à la garantie de l’indépendance de la magistrature, notamment la gestion de la carrière des magistrats, leurs nominations, affectations et avancements par des avis conformes ;

    - La discipline des magistrats civils et militaires et de donner des avis au Président de la République sur toutes questions liées à l’organisation et au fonctionnement de la justice ainsi qu’en matière de grâce ;

    - L’émission de propositions et recommandations sur les questions relatives à la déontologie.

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C- Organisation et fonctionnement :

Le Conseil supérieur de la magistrature comprend trois (3) formations à savoir : l’Assemblée générale, la Formation disciplinaire et la Formation consultative.

    - L’Assemblée générale siégeant en formation plénière : cette Assemblée a lieu sur convocation du Président de la République qui en est le Président. A défaut, elle est présidée par le Garde des Sceaux, ministre de la justice qui en est le Vice-président. En principe, cette session se tient deux fois l’an, précisément en mars et en Octobre. Pour la nomination des magistrats, l’Assemblée doit comprendre, outre son président, au moins douze (12) de ses membres.

    - La Formation disciplinaire : Elle est présidée par le Premier président de la Cour suprême. Elle se réunit sur convocation de ce dernier ou sur saisine du ministre de la justice, ou de tout autre citoyen. Cette formation comprend deux sections à savoir : la section siège, présidée par le Premier président de la Cour suprême et la section parquet, présidée par le Procureur général près la Cour suprême.

    Avant d’exercer l’action disciplinaire, une enquête préalable est menée, s’il y a lieu, par le président de la formation. Le magistrat intéressé est entendu par un magistrat rapporteur ayant au moins son rang. En cas d’empêchement, ce magistrat peut se faire représenter par l’un de ses pairs ou par un avocat. La décision de la formation intervient à huis clos dans les 15 jours du dépôt du rapport d’enquête.

    Pour les questions spécifiques à la Cour des comptes, le CSM doit être composé de 11 membres dont 5 de droit et 6 autres élus par leurs pairs (article 40 de la loi organique susvisée). Pour siéger valablement, la formation de discipline comprend, outre son président, 6 membres au moins. La décision est prise à la majorité de 4 voix au moins. (Voir la loi organique L/046/CNT du 18 janvier 2013 relative à l’organisation et au fonctionnement de la Cour des comptes).

    Il convient de souligner que les magistrats ne sont poursuivis que pour des fautes disciplinaires. Il doit s’agir d’un manquement aux règles d’éthique ou de déontologie. Toutefois, un magistrat ne saurait être disciplinairement poursuivi en raison du contenu de ses décisions juridictionnelles. Celles-ci ne peuvent en effet être critiquées que par le seul exercice des voies de recours prévues par la loi.

    De même, le CSM s’interdit d’apprécier la démarche intellectuelle des juges dans le traitement des procédures qui leur sont confiées. C’est en réalité la distinction entre la faute et l’erreur qui est ainsi opérée, la seconde ne relevant que de l’exercice des voies de recours.

    Dans la pratique, on constate que la plupart des plaintes des justiciables sont déclarées irrecevables car elles sont souvent tardives ou se bornent à contester une décision de justice sans critiquer le comportement du juge. Elles peuvent aussi être rejetées faute de précision suffisante des griefs allégués ou pour cause de prescription sur le fondement de l’article 24 de la loi organique L/055 du 17 mai 2013 qui impose l’exercice de l’action disciplinaire dans les 60 jours suivant la date d’enregistrement du constat de la violation.

    En France, la rigueur observée dans l’appréciation de la question de recevabilité des plaintes des justiciables a amené certains doctrinaires à dire que le CSM fait souvent preuve d’un corporatisme inadapté en sanctionnant trop faiblement les manquements des juges. Ces critiques ont provoqué la recomposition en 2008 du CSM français qui comprend désormais au moins six (6) personnalités étrangères au corps de la magistrature, nommées par le Chef de l’Etat, le Senat et l’Assemblée nationale. Ce CSM est désormais présidé par le Premier Président de la Cour de cassation ou par le Procureur général près ladite Cour.


    A ce jour, le CSM a rendu plus d’une soixantaine de décisions. Il tient une session disciplinaire depuis le 1er novembre 2022 pour une durée au moins d’un mois en vue d’examiner près d’une quarantaine de dossiers enrôlés

    Il est regrettable de souligner que contrairement à la France, les décisions du CSM ne sont susceptibles en Guinée d’aucune voie de recours, même devant la Cour suprême (article 33 de la loi organique L/055 en date du 17 mai 2013 portant fonctionnement du CSM).

    - La formation consultative : elle a charge d’émettre des avis sur toute question liée à l’organisation et au fonctionnement des juridictions ainsi que sur toute question concernant l’indépendance et l’inamovibilité des magistrats du siège. Il en va de même en ce qui concerne le recrutement, la formation des magistrats et l’exercice du droit de grâce.

A noter que le président de la formation consultative (Président de session) est élu chaque année pour un mandat d’un an non renouvelable à la majorité des voix. L’abstention n’est pas admise. Cette formation se réunit une fois par trimestre aux mois de février, mai, août et novembre.

Pour délibérer valablement, chacune des formations du Conseil, à l’exception de l’Assemblée générale, doit comprendre, outre le président de séance, au moins six (6) membres et siéger en composition impaire. Ces formations délibèrent à la majorité des voix et elles sont tenues au secret professionnel.

Lorsque le quorum n’est pas atteint, le Président de la formation peut inviter un autre membre à le remplacer. Les propositions et avis de chacune des formations du CSM sont formulés à la majorité des voix. L’abstention n’est pas admise.

Il convient par ailleurs de mentionner l’existence au sein du CSM, d’un Service dit Secrétariat exécutif. Par Décret D/2021/0059/PRG/CNRD/SGG en date du 02 novembre 2021, ledit Secrétariat a été rattaché à la Présidence de la République.


Ce service est chargé de l’organisation des travaux des différentes formations susvisées du CSM, de la tenue des dossiers des magistrats et des archives en général. Il assure également l’exécution des décisions du Conseil. Ce Secrétariat est dirigé par un Secrétaire exécutif nommé par Décret parmi les membres du Conseil du grade le plus élevé, sur proposition du Ministre de la justice et du Premier Président de la Cour suprême. Le Secrétaire exécutif est présent à la session de toutes les formations du CSM. Toutefois, il n’a pas voix délibérative. Il assure la liaison du Conseil avec le Président de la République.

En conclusion, on peut retenir que le CSM est une institution qui assure une mission essentielle dans la garantie de l’indépendance du pouvoir judiciaire. Il en va de même en ce qui concerne le respect par les magistrats de la déontologie et de l’éthique de leur profession. Toutefois, contrairement à l’opinion de la plupart des citoyens, le CSM n’est pas en charge de la gestion du corps judiciaire. Cette fonction est dévolue au ministère de la justice. L’objectif du CSM est de satisfaire aux exigences du bon fonctionnement de l’institution judiciaire, c’est-à-dire répondre aux attentes des justiciables tout en prenant en compte les aspirations légitimes des magistrats en termes d’indépendance et de carrière.

YAYA BOIRO

SECRETAIRE EXECUTIF